Episode 9 : Game of Chicken

Je maintiens que je considère que le fait d'avoir été victime de discriminations ne suffit pas à faire une communauté. D'autant que si c'était le cas, cette communauté ne se limiterait pas aux gens à la peau noire.

Et la question de la représentation est centrale. Encore une fois, personne ne t'oblige à représenter qui que ce soit d'autre que toi-même, et il est incroyablement prétentieux de vouloir le faire. Après, des spectateurs peuvent se reconnaître en toi, s'identifier à ton parcours, et c'est très bien. Mais pas besoin d'arriver en brandissant un drapeau pour ça.

Et puis il y a l'aspect que tu n'abordes pas, Thomas, et qui est crucial à mes yeux, c'est le rôle éminent de la production, et de Probst en particulier, là-dedans. La volonté de faire de Survivor une émission militante est une évidence pour moi, tout comme celle de refuser catégoriquement qu'un autre point de vue puisse être pris en compte (revois la séquence, vois comme on fait taire Jonathan pour ensuite lui demander de faire un bilan qui entre davantage dans le moule, en mode "j'ai vu la lumière").

S'il y a un mal dont souffre la société américaine en ce moment, c'est bien sa difficulté à échanger entre personnes d'avis différents. De plus en plus, chacun campe sur des positions toujours plus radicales. Survivor pourrait offrir un espace de dialogue mais choisit de faire le contraire. Survivor choisit son camp, et peu me chaut ce que je pense de ce camp, car j'estime que l'émission n'a pas à le faire.

Enfin : ce n'est pas parce que la discrimination raciale est une réalité que cela justifie le discours sur le "racisme inconscient" et les propos tenus par Drea et Maryanne. Ce sont des propos agressifs, qui n'hésitent pas à généraliser des comportements à toute une "communauté" (les non-noirs), laquelle se retrouve essentialisée (elle serait raciste par définition), soit précisément ce qu'elles prétendent dénoncer dans l'autre sens. Le discours qu'elles tiennent n'est pas antiraciste. C'est un discours discriminatoire, qui renvoie tout le monde dos à dos au lieu de tenter de rapprocher les gens.

Il y a quantité de gens, y compris des noirs, qui n'adhèrent absolument pas à ce point de vue. Quand Survivor leur donnera également la parole, on aura un vrai débat de société, et ce sera bien. Mais tant qu'on n'aura que le prêchi-prêcha de quelques victimes auto-proclamées, sans contrepartie, avec Probst qui hoche la tête gravement et change les règles du jeu parce que le moment est trop puissant, ça ne sera pas le cas.

Dernière chose : qui dit que les noirs ont été snobés dans Survivor ? Parce qu'il me semble que la production a longtemps expliqué que les noirs regardaient nettement moins l'émission que les blancs (en proportion), et que du même coup ils étaient aussi proportionnellement moins nombreux à se porter candidats. De plus, on a eu dès le début des personnages noirs hauts en couleurs, allant loin dans le jeu (et assez vite jusqu'au bout), qui étaient très loin de n'être que des faire-valoir.

Je te rejoins sur le fait que la production n'est pas très claire. Je pense qu'elle n'a tellement pas été particulièrement bienveillante sur différents points dans le passé qu'elle cherche à se rattraper et à vraiment qu'on ne puisse plus trop la critiquer sur ce point là. Il faut dire que des propos misogynes, homophobes et racistes il y en a eu dans survivor sans aucune conséquence pour les joueurs fautifs. Tout comme le traitement au montage de certains joueurs (beaucoup d'hommes black étant montrés comme feignants, un gros cliché sur les afro-américains. Beaucoup de filles black ont été traitées comme des filles très agressives, aussi un autre cliché).

Je trouve dommage en effet qu'on n'entende pas la voix de Jonathan également, et on a l'impression que lui même n'ose rien dire parce que sinon il pourrait ressortir du jeu avec l'image d'un raciste.

Je ne partage pas l'avis de tout ce qu'a dit Drea aussi. Tout comme Maryanne. Je ne pense pas que le départ de deux joueurs blacks soit du racisme inconscient. Mais encore une fois, à qui la faute si on en arrive à ce niveau de crispation du débat ? Certainement pas aux minorités mais à la façon dont l'Amérique les traite depuis longtemps.

Pour la question des communautés, je comprends ce que tu veux dire, mais je ne partage pas ton avis. Je viens d'effacer d'ailleurs tout une suite de paragraphe parce que je pense qu'on ne se mettra pas d'accord dessus. Je comprends ton avis car je pensais un peu ainsi avant auparavant et puis je vois les choses différemment maintenant.

Thomas a écrit:

à qui la faute si on en arrive à ce niveau de crispation du débat ? Certainement pas aux minorités mais à la façon dont l'Amérique les traite depuis longtemps.

D'une part, je pense que ce n'est pas aussi simple que "les méchants blancs oppriment tous les non-blancs depuis la nuit des temps", même s'il y a une part de cela. D'autre part, même si ça peut expliquer qu'on en arrive à des prises de positions pareilles, ça ne les justifie pas, et ça ne justifie pas non plus autant de bienveillance (je parle de Probst, là) envers des propos que j'estime, disons, problématiques. Parce que sinon, c'est l'escalade, là où il faudrait au contraire du dialogue et de l’apaisement. Or, il n'y a rien d’apaisant dans le fait d'appuyer un tel discours sans aucune nuance. Au contraire, ça donne du grain à moudre aux vrais racistes et aux trumpistes de tout poil, qui après cela ont beau jeu d'accuser le mouvement BLM de racisme anti-blanc et "les médias" de tous rouler pour le même camp.

S'agissant des clichés... On est dans une émission de télé-réalité. Les clichés, c'est leur fond de commerce. Je n'ai jamais eu l'impression qu'ils étaient plus marqués envers les noirs qu'envers les autres. J'ai retenu un certain nombre de noirs peu doués pour la nage, mais je crois savoir que statistiquement, c'est aussi une réalité aux USA que moins de noirs (proportionnellement) apprennent à nager, pour des raisons en bonne partie liées au statut socio-économique (ils sont moins riches et ont moins accès à des installations publiques telles que des piscines municipales). Mais j'ai repéré tout autant de gros clichés sur les rednecks, sur les mères de famille (quelle que soit leur couleur), sur les jeunes (souvent montrés comme des feignants aussi)... M'enfin, comme le dit Probst, dans ce domaine aussi, perception is reality...

Et sinon, tant mieux si on n'est pas d'accord, sinon le débat ne serait pas intéressant !

Je pense encore que Drea ne renvoyait pas à Jonathan "vous avez en vous un racisme inconscient et il existe des biais puissants en vous" que "j'ai moi-même en moi de profonds biais et une lecture "racisée" née de mon histoire et je me rends compte que ça va altérer mon jeu et ma décision".

Je crois que tout ce qui s'est passé a ce conseil tenait du monologue pour Drea (mais forcément comme Maryanne a rajouté son élégant grain de sel, ça a donné une sensation plus vaste) ...

Maryanne n'a pas renvoyé que les blacks avaient une chance moindre à cause de l'attitude des joueurs non blacks, mais surtout parce qu'ils se sentent investis d'un devoir de représentation, d'une appartenance malgré eux à une "cause" et qu'ils vont, de façon presque sadomado, se compliquer le jeu à chaque fois ...

Pour moi, il s'agissait beaucoup d'un plaidoyer où des afro américains exposent les difficultés qu' il s'imposent à eux-mêmes en relation avec l'histoire, et pas tellement d'une attaque sur autrui ...

Vaste débat

Je peux entendre ce que tu dis, mais tout part quand même d'une affirmation comme quoi les noirs sont toujours les premiers éliminés dans Survivor, ce qui est faux, y compris dans cette saison (on est post-merge, quand même). Drea voit deux noirs sur un banc et affirme qu'ils s'y trouvent à cause de leur couleur de peau. Et à aucun moment elle ne revient sur cette affirmation.

Ton interprétation est peut-être juste, mais n'empêche que ce n'est pas ce qu'elle dit. Et, encore une fois, Probst valide ce qu'elle dit de ses graves hochements de tête.

Il faut quand même réaliser que puisque Survivor a décidé de caster davantage de "minorités visibles", ben forcément, il y a aussi davantage de gens issus de cette catégorie qui vont être éliminés. Probst ne va pas devenir Jacques Martin version École des fans et filer un million à tout le monde.

Peut-être que c'est plus facile aussi pour les minorités de s'exprimer quand elles ne sont pas toutes seules dans le cast, justement.

Et puis on peut dire que certains sont venus pour défendre leurs idées politiques mais clairement une Maryanne n'est pas là pour ça et pourtant elle se sent aussi concernée.

Quand j'ai vu qu'il restait 20 minutes d'épisode avant le premier conseil et que ce dernier fut expédié en 5, je me doutais qu'un truc allait se passer.

Je trouve ça dommage que le sujet de l'ethnie revienne dans le jeu (que je différencie de l'émission), les éliminations de Channelle et Rock n'ont évidemment rien à voir avec ça. Mais bon, difficile de se mettre à la place de Drea et Maryann et on peut comprendre leur réaction.

Quant au reste de l'épisode, on a eu une immunité expédiée à cause de la houle (déjà 2 fois cette saison). J'aime bien le twist de 2 sous-équipes, 2 conseils le temps d'un épisode. Assez marrant qu'on soit presque dans une configuration homme/femme après la proposition d'alliance masculine de Rocksroy un peu plus tôt, ça l'aurait été d'autant plus si on avait eu Jonathan à la place de Romeo (qui n'était pas dans l'alliance de Rock si je ne m'abuse).

Les discussions pré-conseils furent très brèves, j'en retiens que Hai arrive quand même à contrôler le vote de Mike à chaque fois, que c'est encore Omar qui est à l'origine de la stratégie et que Jonathan a perdu toute chance de gagner à mes yeux avec 2 erreurs stratégiques/sociales :

1- Dire à Maryann qu'ils vont voter Drea à qui ils vont dire de voter Maryann. Pourquoi ne pas dire à Maryann qu'ils vont proposer Tori à Drea ? Il n'y avait aucun risque à faire ça.

2- Sa discussion houleuse avec Lindsay pour rien du tout. Il se vexe vite pour pas grand chose.

Respect à Tori pour sa réaction de sortie, elle aurait pu être frustrée mais est sortie avec classe. Sortir Drea aurait été un grand coup, dommage.